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vendredi 19 février 2010

Malcom X et les impasses de la violence

Extrait Vidéo de L'INA à propos de Malcom X



Après l'assassinat de Malcolm X, (1965) Martin Luther King  parla d'une « déplorable tragédie » et, malgré leurs idées parfois divergentes, reconnu Malcolm comme « un des espoirs les plus radieux d'Harlem » et « un afro-américain brave et valeureux, à jamais invaincu »
Je ne souhaite pas ici forcer les contradictions mais - autant que faire se peut - analyser et montrer en quoi la violence dans ces moments cruciaux de l'histoire de la communauté noire américaine fut une impasse...PP

                   ci-dessous : MLK et Malcom X


Biographie extraits (source Wikipédia avec liens  réajustés) 

Malcolm X (19 mai 1925 - 21 février 1965), né Malcolm Little, également connu sous le nom de El-Hajj Malek El-Shabazz (الحاجّ مالك الشباز‎ en arabe) , est un prêcheur musulman afro-américain, orateur et militant des Droits de l'homme. Aux yeux de ses admirateurs, il est un défenseur courageux des droits afro-américains ayant mis en accusation les États-Unis pour ses crimes envers la communauté noire. En revanche, ses détracteurs l'accusent d'avoir prêché le racisme le suprémacisme noir et la violence Il a été de nombreuses fois décrit comme l'un des plus grands et des plus influents Afro-Américains de l'Histoire.
Malcolm naît à Omaha dans le Nebraska Alors qu'il est âgé de treize ans, son père meurt, puis sa mère est transférée en hôpital psychiatrique. Son enfance, comprenant l'éducation de son père axée sur la fierté noire, et ses propres expériences sur le sujet, ont joué une influence très importante tout au long de sa vie. Après avoir vécu dans de nombreuses familles adoptives, Malcolm rentre dans le milieu criminel de Boston et de New York. En 1946, il est condamné à dix ans de prison.
Pendant son enfermement, il devient membre de Nation of Islam. Après sa mise en liberté conditionnelle en 1952, il devient l'un des leaders et porte-parole du groupe; pendant presque une douzaine d'années, il représente publiquement Nation of Islam. Les tensions entre Malcolm X et Elijah Muhammad, chef de Nation of Islam, l'amènent à quitter l'organisation en mars 1964.
Il fonde Muslim Mosque, Inc., une organisation religieuse ainsi que l'Organization of Afro-American Unity. Suite à un pèlerinage à La Mecque cette même année, il devient sunnite et désavoue publiquement le racisme; il se rend également dans divers pays d'Afrique et du Moyen-Orient. Moins d'un an plus tard, le premier jour de la National Brotherhood Week (semaine nationale de la fraternité), il est assassiné à New York. Trois membres de Nation of Islam sont condamnés pour ce crime (l'un d'eux ayant avoué).

Désarmer les dieux (J.M. Muller) suite...


Jean-Marie MULLER, 2010 - Désarmer les dieux. Le christianisme et l'islam au regard de l'exigence de non-violence. Le Relié Poche, 720 pages, 15 euros. Philosophe et écrivain, Jean-Marie Muller a écrit de nombreux livres sur la non-violence considérés comme des ouvrages de référence en France comme à l’étranger

Avant-propos (extraits) -

jean pierre muller désarmer les dieuxLes hommes de foi sont des hommes de certitude. Ils ont la conviction de posséder la vérité ultime, et de la tenir directement de Dieu. De ce fait, ils se donnent volontiers la mission de la défendre contre les infidèles et les hérétiques. Alors, par un détournement de procédure, ils prétendent agir au nom de Dieu en jetant l’anathème tout alentour. Pour cela, ils cèdent facilement à la tentation de tuer, au risque de pervertir radicalement la vérité qu’ils veulent faire triompher.

Par l'enseignement rigide d'un discours dogmatique fermé, les religions historiques ont souvent disposé les hommes à l'intolérance, plutôt qu'à la bienveillance. Elles ont ainsi nourri les nationalismes communautaires qui professent la discrimination, l'exclusion, la violence et le meurtre.

La lutte du bien contre le mal se trouve au cœur de l'imaginaire religieux. Cette lutte est d'abord présentée comme un combat spirituel que le croyant doit mener contre lui-même. Mais ce même croyant est également invité à lutter contre le mal qui existe dans le monde. Le croyant qui se veut intègre, l’intégriste, commande le Bien et interdit le Mal. Et aux autres avec plus d’intransigeance qu’à lui-même.

Pour décrire l'intensité de cette lutte, il est souvent fait référence au symbolisme de la violence : le croyant est un soldat appelé à s'engager dans la guerre du bien contre le mal. Insidieusement, cette rhétorique guerrière utilisée pour décrire la lutte spirituelle contre les forces du mal censées être à l'origine du désordre du monde, appelle le croyant à faire réellement la guerre contre les mal-faiteurs. Le désir excessif et déréglé de pureté conduit à désirer l’épuration, qui est une abjection.


Souvent, trop souvent, des hommes religieux ont construit des représentations de la divinité à travers lesquelles Dieu fait peser sa malédiction sur ses ennemis et recourt lui-même à la violence pour les punir. Et dès lors que les hommes se représentent Dieu comme un être violent qui châtie les méchants, ils auront tout loisir de justifier leur propre violence à l'encontre de leurs ennemis, en croyant que Dieu cautionne et bénit leur comportement. Ils iront même jusqu'à imaginer que Dieu leur commande le meurtre des infidèles. C’est ainsi qu’en de nombreux versets, la Bible et le Coran privilégient les thèmes de la violence de Dieu et de la violence en Dieu. Ce sont ces textes que j’interrogerai et avec lesquels je dialoguerai tout au long de cette étude. Je me demanderai comment dérouter ces textes afin de désamorcer leur nuisance, afin qu’ils n’alimentent plus les désirs de violence qui veillent sans jamais prendre de repos dans le cœur et l’esprit des hommes.

Chacun peut douter de l’existence de Dieu, mais nul ne peut ignorer l’existence de nombreux dieux armés que les hommes violents ont imaginés pour justifier leur propre violence. Ce sont ces faux dieux qu’il faut désarmer pour pouvoir penser Dieu. Celui qui croit en de faux dieux ne rend pas un culte à Dieu, mais à des idoles. Les dieux jaloux, les dieux encolérés, les dieux justiciers, les dieux vengeurs, les dieux violents, les dieux meurtriers, les dieux guerriers, tous ces dieux armés sont des idoles que les hommes ont fabriquées en projetant sur elles leurs fantasmes.

Il importe d’abord de devenir athée de toutes ces divinités noires. Or, précisément, pour l’homme raisonnable qui reconnaît la violence comme l’autre absolu de l’esprit, les faux dieux sont tous ceux qui pactisent avec la violence en étant eux-mêmes violents et en commandant aux hommes de recourir à la violence pour défendre leur honneur. La violence ne peut jamais être un ordre, elle est toujours un désordre. En définitive, ce sont les religions qu’il faut désarmer, en désarmant les divinités qu’elles ont créées pour satisfaire les désirs meurtriers de leurs fidèles. Cela implique de désarmer les prophéties et les théologies, de désarmer les prophètes et les théologiens.

La question qui sous-tendra ma réflexion tout au long de ces pages, ce n’est pas comment croire en Dieu, mais comment penser Dieu ? J’explorerai l’idée de Dieu, non pas la foi en Dieu. L’idée, dans le sens de la forme intelligible par la pensée. Toute idée de Dieu n’est qu’une représentation humaine de Dieu. Mais toute foi en Dieu implique une idée de Dieu. Et, souvent, la théologie devient une idéologie. Je questionnerai les idées de Dieu transmises par les idéologies religieuses. Je m’efforcerai de débusquer les représentations d’un dieu armé qu’elles recèlent et tenterai de les déconstruire.

L’intuition essentielle autour de laquelle s'articulent les réflexions que je viens partager avec mon lecteur est que la violence ne peut pas être un attribut de Dieu. Dieu ne peut pas être violent. L’Être de Dieu ne peut être que pur de toute violence. Dieu ne peut être que pure non-violence. En disant non-violence, je reste sur le registre de la négativité. Cependant, il ne s'agit pas d'une simple, mais d'une double négativité. Et, en ce sens, celle-ci devient une affirmation positive. La limite extrême de mon hypothèse de travail pourrait se formuler ainsi : Dieu n’existe peut-être pas, mais, s’il existe, il ne peut être que pure non-violence.

Il m’a semblé essentiel de conduire conjointement l’approche critique du christianisme et celle de l’islam en procédant avec la même méthode d’investigation. Il importe d’éviter une fois pour toutes le piège qui consiste à absoudre les dérives d’une religion en accusant les autres des mêmes dévoiements. Ce défaut de méthode marque trop souvent la confrontation entre le christianisme et l’islam, jusqu’à la rendre stérile. Les violences perpétrées au nom du christianisme ne permettent pas d’occulter celles commises au nom de l’islam, et réciproquement. On ne peut soustraire les unes aux autres en sorte de parvenir à une sorte de bilan à somme nulle. Toutes ces violences s’additionnent dans un bilan largement négatif. Plus que cela : dramatique.

Pour conduire ce travail, je dialoguerai avec les textes de la Bible et ceux du Coran en m’efforçant d’être à la fois respectueux et rigoureux. Je dialoguerai encore avec les croyants dans le même esprit de respect et de rigueur.



jeudi 18 février 2010

Cécile Duflot : à propos des minarets

Côte d'Ivoire : vers une non-violence electorale...

 mercredi 17 février 2010 - Par Le Patriote
Les élections en Afrique sont en général émaillées de violence. Pour ne pas que cette situation arrive en Côte d’Ivoire, l’ONG Diaspora Africaine en Europe a décidé d’organiser une campagne de sensibilisation à travers toute la Côte d’Ivoire. L’annonce a été faite au cours d’un point de presse à Cocody par M. Eba Amoikon, le délégué zone Europe de cette ONG. Pendant la durée de cette campagne, il s’agit selon M. Amoikon, pour Diaspora Africaine en Europe, à travers les artères principales des villes de Côte d’Ivoire, d’initier une caravane d’animations, de sensibilisation, de jeux et de distribuer des tracts et des gadgets pour attirer l’attention des populations sur les conséquences des violences électorales.
Au cours de cette caravane, il sera également question, selon le responsable Europe de l’ONG, d’appeler les citoyens à un comportement pacifique et de fair-play après les proclamations des résultats des élections présidentielles à venir. Pour véhiculer ce message, l’ONG entend utiliser les supports comme les tee-shirts, les flyers, des casquettes, des foulards, des mouchoirs, des fanions, des affiches, des banderoles etc. Pour joindre l’utile à l’agréable, des sketchs et des concerts populaires sont prévus avec pour point focal la non-violence, la paix, la concorde et l’unité nationale. 


( Source et suite de l'article sur le site de Le Patriote )

jeudi 11 février 2010

Ecologie et non-violence

Nous proposons dans les pages suivantes un compte-rendu de l’intervention de Jacques
Muller pendant un Forum sur l'écologie et la non-violence

L’écologie est désormais en avant de l’actualité. Elle est entrée dans le champ politique. Tout
le monde en parle : prise de conscience indiscutable par nécessité, ou récupération
économique et politique en tant que sujet porteur ?
En tant que mouvement politique, promoteur d’une non-violence politique : le débat est
nécessaire ! Les enjeux sociétaux sont considérables : là aussi, il est nécessaire d’ouvrir la
réflexion pour croiser les deux concepts.

Enjeux de l’écologie et de l’écologie politique

Pour l’opinion publique, les journalistes (mais aussi pour les adversaires de l’écologie
politique, l’écologie est assimilée à la défense (à tout prix ?) et la protection de la nature.
C’est une définition totalement restrictive. Une clarification est nécessaire.
Approche scientifique ou naturelle (Alain Lipietz)
L’écologie est la science du rapport triangulaire entre les individus d’une espèce, l’activité
organisée de cette espèce, l’environnement de cette activité. Exemples : équilibre lapinsrenards
avec les notions de : cycle prédateurs/proies, capacité de charge d’un territoire,
équation de Lotka-Voltera, hiérarchie et niches écologiques, crises écologiques et évolutions,


l’être humain « superprédateur ».

Il existe des espèces sociales, avec une division du travail, de l’activité qui transforme
l’environnement pour satisfaire les besoins des individus et de l’espèce (exemples : fourmis,castors et… êtres humains)

L’écologie politique (Alain Lipietz)

L’être humain est une espèce politique, non programmée génétiquement, qui s’organise en
« polis » (cité) après délibération : « bien/mal/souhaitable » etc.
Les moments de crises sont surmontées en changeant l’organisation sociale : l’évolution
socio-économique est la forme principale d’évolution de l’espèce humaine.
L’écologie politique, c’est l’écologie de l’Etre Humain, notre espèce, une espèce unique, car
sociale et politique. Elle s’intéresse au rapport triangulé entre : Les êtres humains et les
activités humaines organisées : sociologie, anthropologie, psycho-sociologie, psychanalyse,
économie « pure et dure » qui mesure uniquement les quantités (argent, rendement). Nota :
nomos = règle, mesure ; eco = domaine.
L’impact des activités humaines sur l’environnement : tant d’exemples bien connus !L’impact de l’environnement sur les individus : agronomie (capacités à produire),
épidémiologie, hygiénisme, radiologie, etc.

Remarques importantes

Différencier ECOlogie et ECOnomie. En effet, si nomos renvoie à règle, logos renvoie à sens,
raison d’agir : est-ce prudent, utile, juste ? D’où la nécessité du débat démocratique…
Le danger est de limiter l’écologie à l’étude de l’impact des activités humaines sur l’écologie
comme c’est souvent le cas par les médias, les détracteurs et l’opinion publique.
L’écologie politique relève d’une démarche encyclopédiste : les 3 pôles sont indissociables.
L’écologie politique pose ces deux questions parfaitement liées : comment notre organisation
sociale nous conduit-elle à modifier l’environnement ? et les effets des ces modifications sur
les individus, sont-ils favorables ou défavorables ?
L’écologie de l’Etre Humain ne peut être que sociale et politique, avec une éthique propre :
responsabilité : développement soutenable (« éco-développement »)
Solidarité maintenant, avec priorité pour la satisfaction des besoins des plus pauvres, avec
affirmation de l’égalité fondamentale des êtres humains
Solidarité avec les générations futures : « intérêt bien compris de l’humanité » ?


Ecologie « sociale » et écologie « profonde »

L’écologie sociale est suspectée d’anthropocentrisme, restreignant le débat (trop ?) politique à
 la question des « rapports sociaux », sans prendre en considération la terre qui nous précède.
L’écologie profonde est suspectée d’idôlatrie par rapport à une nature originelle sacralisée.
Des dérapages existent : nature mise sous cloche car l’être humain en est l’ennemi.
Ne pas opposer les deux ! Leur point commun est une forme de radicalité… somme toute
nécessaire ! Il existe une hiérarchie des normes : l’Etre Humain n’est pas une espèce parmi
d’autres. Mais le respect, l’amour, l’admiration de la nature et le refus de la nature entant
qu’objet d’exploitation sont des fondements respectables et nécessaires : approche sensible,
tripale et pas seulement intellectuelle.

Les liens entre l’éthique de la non-violence et l’écologie

Il existe un parallèle indiscutable en termes de ruptures sur le plan culturel :
Ruptures de la non-violence : refus de la violence, désacralisation de la violence.
Ruptures de l’écologie politique : refus du productivisme, de la religion de la croissance
économique (décroissance ?), d’une nature chosifiée, à « exploiter », du dogme du pouvoir
d’achat, refus du techno-scientisme, de la domination de l’être humain sur les êtres vivants
(Gandhi), et vénération de la nature (Thoreau), lieu de « la vraie vie »
Un même refus de la domination d’un être humain sur un autre, un même refus de la
domination de l’être humain sur la nature ? Un respect de l’être humain et de la nature ?
On observe des parallèles évidents en termes de valeurs et propositions de pratiques
politiques, mais avec un apport spécifique, essentiel, décisif, ( ?) de la non-violence !
Du côté de la non violence : non pas la révolution, mais la responsabilité et l’autonomie, la
solidarité et la démocratie, la recherche du compromis, (cf. chez Gandhi « la beauté du
 compromis »), les accords « gagnant-gagnant », l’exigence, incontournable, de cohérence
entre la fin et les moyens (principe fondateur valable au plan individuel comme au plan
collectif), le programme constructif alternatif

Du côté de l’écologie politique :

non pas la révolution, mais la responsabilité individuelle et
collective : « l’éco-citoyenneté », la solidarité, y compris avec les générations futures et les
plus pauvres », le « radical-réformisme » : savoir construire des avancées concrètes, mais
forcément limitées, compte-tenu du décalage entre les visées sociétales à long terme et la dure
réalité !

Pour ne pas conclure

L’écologie politique reste une « terre de mission » pour les promoteurs de la non-violence, et
ses propositions aussi originales qu’essentielles… et méconnues : programme constructif
alternatif (la dénonciation ne suffit pas !), exigence radicale de cohérence entre la fin et les
moyens, recherche d’accords gagnant-gagnant.

La non-violence est clairement inscrite dans les textes fondateurs de l’écologie politique.

Et certaines luttes historiques, ou plus récentes, ont mis en oeuvre des moyens d’action
s’inscrivant typiquement dans la tradition non-violente (jeûnes, désobéissance civile, etc.)
Mais l’exigence éthique de la non-violence en termes de pratiques politiques individuelles et
collectives, dans le jeu politique au quotidien, me semble toujours globalement absente : pour
la plupart, l’éthique de la non-violence semble -à tort !- encore et toujours rimer avec
Un moralisme ringard, suspect, car supposé entaché d’une forme de spiritualisme
Une naïveté ou un angélisme qui ne peuvent qu’être hors sujet lorsqu’on fait de la politique,
dans cet univers dur, violent, dans lequel chaque coup porté ou reçu compte, et où le
réalisme » doit impérativement primer sur toute autre considération…
La (re)découverte de l’éthique politique de la non-violence, et surtout sa mise en pratique, me
semble pourtant un enjeu essentiel en terme de « politique autrement »
En effet cette arlésienne du fameux « la politique autrement » n’est pas un luxe : il est devenu une nécessité,
une sorte d’ « ardente obligation », et pas seulement pour les promoteurs de l’écologie
politique, mais pour le monde politique pris dans sa globalité.
Car il en va :
De la désillusion croissante de nos concitoyens, et plus particulièrement de la jeunesse, par
rapport aux acteurs de la vie politique (« tous pourris »),
De la désertion par rapport au débat politique et donc du fonctionnement de la démocratie : la
voie est grande ouverte aux démagogues de tout poil (à droite comme à gauche),
D’une forme de fatalisme, résigné ou sarcastique, voire de désespérance par rapport à notre
avenir pourtant commun : « sauve qui peut et chacun pour soi : profitons-en tant que c’est
encore possible, après moi le déluge ! »
C’est pourquoi les tenants de l’écologie politique ont une responsabilité toute particulière :
(re)découvrir la non-violence à laquelle ils font référence, la (re)mettre en action, dans les
pratiques politiques au quotidien.
Et les « non-violents » ont un rôle tout particulier à jouer :
Enjeu de partenariat en terme de formation, de compagnonnage dans les luttes, évidemment
pas pour donner des leçons, car nous savons tous à l’expérience que la non-violence n’est pas
un état de fait, acquis, mais un chemin à parcourir, ensemble.

Hannah Arendt : Pouvoir et Violence

Une approche de la théorie politique de Hannah Arendt









LE POUVOIR COMME  "AUTRE"  DE LA VIOLENCE.

(...) selon Arendt, le politique ne suppose que le rassemblement d'hommes égaux décidés à l'action, la "puissance" qui surgit de ce rassemblement étant exclusive de tout acte d'allégeance. Ce pouvoir n'étant rien de matériel ou d'instrumental, nul ne peut le conquérir ou se l'approprier il n'existe qu'entre les hommes qui parlent et agissent en commun; rebelle à toute définition chosiste, il se corrompt en se consolidant. Comme l'affirme un passage suggestif de l'Essai: "Le prétendu pouvoir du dirigeant qui est freiné dans un gouvernement constitutionnel, limité, légitime, n'est pas en fait pouvoir, mais violence, c'est la force décuplée de l'homme unique qui a monopolisé le pouvoir de la multitude" (p. 221). Si Arendt admet, sans s'expliquer très clairement sur cette distinction, que le pouvoir peut bien être exercé "au nom" d'une communauté politique, elle refuse toute forme de délégation réelle qui entraînerait irrémédiablement une déperdition de la puissance de la "multitude": le corps politique ne dispose donc d'aucune faculté de substitution, tout pouvoir installé à distance de ce corps étant voué à dépérir.
Mais qu'en est-il précisément de cette violence dont le pouvoir est l'antithèse? L'élucidation de la violence politique exposée dans Du Mensonge à la violence repose pour l'essentiel sur une description phénoménologique économe en hypothèses. Parce qu'elle est imprévisible, qu'elle introduit une rupture radicale dans l'ordre des choses et que ses effets sont incommensurables à ce qui l'a provoquée, la violence ressemble bien à l'action. A défaut d'être efficace, elle est expéditive et peut même parfois être justifiée à des fins de libération. Mais ce raccourci destructeur ne peut jamais être légitime ni déboucher sur la liberté. Car, d'une part, la violence reste toujours le moyen, souvent inapproprié, d'une fin extérieure, et, d'autre part, elle a sa source dans un individu ou du moins dans un groupe unanime. Geste muet, irresponsable et négatif qui ne travaille pas à sa propre suppression, elle peut au mieux - dans le cas, par exemple, d'une guerre de libération - faire place nette sans rien instaurer. Succédané défaillant de l'action, elle ne peut que détruire le pouvoir sans jamais être susceptible de l'engendrer, même lorsqu'elle est exercée par une instance souveraine. Elle n'est donc pas un excès de pouvoir, ni la manifestation ultime de celui-ci dans l'épreuve de force, mais son autre radical. Ainsi "la confrontation récente entre les chars russes et la résistance totalement non violente du peuple tchécoslovaque constitue un exemple typique de l'opposition entre la violence et le pouvoir à l'état pur" (MV p. 163).

Cette très nette opposition permet encore de saisir en quoi le pouvoir est pour Hannah Arendt une réalité positive; loin qu'il faille restreindre cette capacité collective de donner naissance, on doit en étendre le cercle par un partage qui l'accroisse en le diffusant. Car ce n'est pas le pouvoir qu'il faut redouter, mais l'impuissance convertie en force de qui prétend s'en emparer. Il ne corrompt pas, mais se corrompt lorsqu'il est aliéné.
On objectera que le pouvoir est interrogé dans sa source et non dans son emploi, comme s'il n'était pas appelé à s'exercer sur quelque chose et pouvait renoncer à toute stratégie. Mais il n'y a pas là une négligence de la part l'auteur, qui effectivement ne lui attribue aucune fonction : ni rempart de la sécurité permettant de promouvoir le bien être matériel, ni levier du bonheur social, "le pouvoir peut se passer de toute justification" (MV, p. 16l) – non de la légitimité -, puisqu'il existe à seule fin de préserver l'"espace politique". La critique peut porter sur cette intention, mais elle peut difficilement entamer la cohérence de la vision qui en découle.

André Enegrén     
 (source Pages du site http://www.philagora.net/ ou http://www.philagora.com/



9- R. Aron, Etudes politiques, Gallimard, 1972, page 154

10- J. Freund, L’essence du politique, Sirey, 1965, page 140

11- A. Radcliff- Brown, Préface à M. Fortes et E. E. Evans-Pritchard, African polical System, Oxford University Press, 1950, page XIV.

mercredi 10 février 2010

Iran: vers une révolution non-violente ?


Après la chute du Chah, une seconde révolution

 est-elle en gestation?

Delphine Minoui ( source LE TEMPS MONDE )

Mir Hossein Moussavi, leader de l’opposition iranienne. (Keystone)

Alors que la République islamique d’Iran souffle ses 31 bougies, une crise politique sans précédent traverse le pays depuis maintenant sept mois. Retour avec le sociologue Amir Nikpey sur ce «mouvement vert», né de la victoire contestée de Mahmoud Ahmadinejad
L’ Iranien Amir Nikpey, chercheur-enseignant à l’université Shahid Behechti de Téhéran, et co-auteur, avec Farhad Khosrokhavar, de «Avoir vingt ans au pays des ayatollahs» revient sur la détermination de l’opposition iranienne, alors que plusieurs manifestations de grande ampleur sont attendues demain, à l’occasion du 31e anniversaire de la République islamique.
Le Temps: 31 ans après la chute du Chah, une seconde révolution est-elle en gestation? 
Amir Nikpey: Le contexte est différent. La plupart des opposants d’aujourd’hui ne tiennent pas de discours révolutionnaires. Ils rejettent en bloc la violence. Leur mouvement est pacifique. Il est enraciné dans la société civile: les jeunes, les femmes, les minorités sociales et ethniques… A l’époque, les différents groupes politiques – des partisans de l’ayatollah Khomeiny aux fedayins de gauche en passant par les moudjahidin du peuple – étaient beaucoup plus radicaux. Certains étaient armés. Aujourd’hui, les revendications se basent sur des concepts de justice, d’égalité, de non-violence. Elles ne sont pas nouvelles mais l’élection de juin dernier, considérée comme frauduleuse, les a propulsé sur le devant de la scène. Pour l’heure, la très grande majorité des Iraniens de l’intérieur aspirent à des réformes, pas à un renversement du système.
– Avec le renforcement de la répression, on assiste pourtant à une radicalisation de l’opposition? 

- S’il vise à museler l’opposition, le recours à la force s’avère contre-productif. Ainsi, l’exécution récente de deux jeunes opposants n’a fait que galvaniser les protestataires, qui ont appelé à une importante mobilisation, ce 11 février. Lors des dernières grandes manifestations de l’Ashoura, le 27 décembre, un nouveau cap, il est vrai, a été franchi. L’usage de la brutalité par le pouvoir, et la mort de plusieurs manifestants, a poussé certains protestataires à basculer dans la violence. Non par choix, mais par réaction. Ainsi, c’est parce qu’ils ont été provoqués que des manifestants se sont mis à saccager des postes de police. Plus le pouvoir se durcira, plus le risque d’un embrasement est élevé.

samedi 6 février 2010

Désarmer les dieux (J.M. Muller)




Militant de la non-violence, Jean-Marie Muller
mène de front les analyses historiques, philosophiques
et théologiques
pour mieux cerner les sources de violences dans le christianisme
et l'islam.
Son objectif : enfin désarmer les dieux.

jeudi 4 février 2010

Israel : Gideon Levy une voix isolée...

Interview Jacques-Alain Miller : la burqa

* (source lePoint.fr)

« Porter la burqa, c'est tuer symboliquement l'homme, c'est incarner sa castration »

Propos recueillis par Christophe Labbé et Olivia Recasens


Le Point : Que se passe-t-il dans la tête de ces Françaises converties qui ne sont pas nées de parents musulmans ni ne descendent d'immigrés récents, et qui adoptent le voile intégral ?
Jacques-Alain Miller : Ces femmes ne s'allongent pas sur les divans. Si vous voilez votre corps dans la rue, ce n'est pas pour aller chez des inconnus dévoiler vos pensées. En revanche, chez leurs soeurs dévoilées qui sont, elles, en analyse, la burqa ne suscite ni compréhension ni indignation, mais « horreur ». C'est le mot qui revient.
Pourquoi l'horreur ?
Vivre en société, c'est être vu. Le monde visible est toujours un monde potentiellement voyeur. Se retrancher de cette dimension va bien au-delà de se protéger du désir de l'homme : c'est le tuer symboliquement, c'est incarner sa castration. Voilà ce qui est ressenti comme monstrueux.
A vos yeux, il n'en est rien ?
Les religieuses cloîtrées se soustraient elles aussi au lien social pour se vouer à capter le désir de Dieu. La différence, c'est qu'elles ne se montrent pas et qu'elles sont placées sous le contrôle de l'autorité ecclésiale. En revanche, se promener en burqa dans la cité, c'est parader en tant que cachée, c'est s'exhiber en costume de méduse. C'est aussi diviniser la fonction du mari, en faire un Dieu jaloux.
Qu'est-ce qui est insupportable dans cette attitude ?
D'abord, c'est une forme d'idolâtrie. Ensuite, elle coupe la société de la famille, qui, dans notre tradition, en est la cellule fondamentale. Enfin, voir sans être vu, c'est être pur regard : ça paralyse toute interaction, ça rend impossible l'intersubjectivité. La burqa n'est pas citoyenne. Si elle fait trembler la République française, c'est qu'elle ridiculise ses fondements imaginaires : liberté, égalité, fraternité.
De quoi la burqa est-elle le symptôme ?
C'est un signifiant très pur, susceptible de significations multiples et contradictoires. Chacun l'interprète à son gré, selon son système de valeurs : soumission, pudeur, offense aux droits de la femme, droit imprescriptible à la différence, croyance, autoségrégation, agression, etc. C'est un piège à fantasmes.
Quel sera l'avenir de la burqa en France ?
Laissée à elle-même, elle aura le destin des marques distinctives scandaleuses et extrêmes dans les économies de marché : des femmes témoigneront de leur bonheur à porter la burqa, on nous l'expliquera par l'imagerie cérébrale, John Galliano s'en inspirera pour sa prochaine collection, il y aura un dandysme de la burqa et, à terme, elle finira par se banaliser. Il existe déjà un prototype de Barbie en burqa.
Et si on l'interdit ?
Même décoré du nom de loi, ce ne sera jamais qu'un règlement de police. Notre République laïque a décidément bien de la peine avec des modes de jouir qui ne relèvent pas de la tradition judéo-chrétienne. En vérité, sous toutes les latitudes, la jouissance féminine, on se sait pas où la fourrer. Explicitement ou non, on la met toujours sous burqa. Comme disait Alphonse Allais : « La première fois que j'ai vu une femme nue, j'ai cru que c'était une erreur. »
* Philosophe et psychanalyste.
Dans  les archives de ce blog on pourra se reporter à l'audition de la Commission parlementaire   du philosophe Henri Pena-RUIZ : " A propos du voile intégral" : " Le droit à la différence est-il la différence des droits?" (PP)



mardi 2 février 2010

La Marche pour Gaza : récit et photos !

LA "MARCHE POUR GAZA" : RÉCIT D’UNE AVENTURE MÉMORABLE (ET PHOTOS !)

Publié le 4-01-2010 ( source EuroPalestine )






Nous venons de rentrer du Caire. Le gouvernement égyptien a interdit aux 1360 internationaux de rentrer à Gaza pour manifester leur soutien aux Gazaouis et pour dire NON au blocus. Mais ce faisant, il a nous a amené à créer, à partir de la capitale égyptienne, une situation qui a permis de soutenir de manière encore plus spectaculaire le peuple palestinien.
Ce bilan, ce sont nos amis Gazaouis, qui l’ont rapidement tiré, en nous envoyant des messages de remerciements et de félicitations pour avoir mené des actions au retentissement mondial, concernant le siège qui leur est imposé, et ceux qui en portent la lourde responsabilité. "Les actions spectaculaires et très médiatisées que vous menez actuellement au Caire sont bien plus efficaces pour nous que la visite programmée de la bande de Gaza", nous ont affirmé les organisateurs palestiniens de la Gaza Freedom March.(Lire la suite (et visionner les photos)





lundi 1 février 2010

Philippe Lacadée : Sur l'adolescence

 (vidéo)



Un entretien de Philippe Lacadée, psychanalyste, membre de l'ECF, coordinateur européen du CIEN, mené par Joseph Rossetto principal du collège Pierre Sémard à Bobigny.
Philippe Lacadée est l'auteur de deux ouvrages, "Le malentendu de l'enfant", éditions Payot Lausanne et de "L'éveil et l'exil, enseignements psychanalytiques de la plus délicate des transitions : l'adolescence" éditions Cécile Defaut.
Joseph Rossetto est, quant à lui, l'auteur de "Jusqu'aux rives du monde. Une école de l'expérience" France 5 éducation-Imaginem, éditions Striana. Philippe Lacadée nous déploie ici son propos autour de l'adolescence et de ce qu'il appelle "la crise de la langue articulée"
 (Merci à Jean-François Ferbos  qui nous a communiqué ces vidéos).

2 VIDEOS d'entretien avec Philippe Lacadée. Source ECF